Rubrique 2515 : Maîtriser la réglementation du broyage et concassage pour une exploitation responsable #
Périmètre de la rubrique 2515 et activités concernées #
La rubrique 2515 s’applique à une vaste palette d’opérations, toutes centrées autour du broyage, du concassage, du criblage, de l’ensachage, du tamisage, du nettoyage, du mélange et de la pulvérisation de matériaux minéraux. Sont concernés aussi bien les minéraux naturels comme le granite ou le calcaire, que des produits artificiels (pavés en béton, granulats manufacturés), qu’on retrouve sur les lignes de production d’entreprises telles que LafargeHolcim ou Eurovia, filiale du groupe Vinci.
Le champ d’application couvre :
- Installations permanentes exploitées plus de six mois consécutifs sur le même site.
- Unités temporaires pour des chantiers de durée inférieure à six mois, typiquement déployées lors de grands projets d’infrastructures par des leaders du secteur comme Colas SA ou Spie Batignolles.
- Inclusion de toute la puissance totale cumulée des équipements (concasseurs, broyeurs, cribles) présents sur le site au moment du contrôle réglementaire, qu’ils soient fixes ou mobiles.
Cette définition extensive, redéfinie en 2018 par l’arrêté du 22 octobre modifiant l’arrêté du 26 novembre 2012, permet de réguler efficacement les projets de développement majeurs, comme ceux de Carrières du Bassin Parisien, tout en couvrant les prestations ponctuelles réalisées lors de la reconstruction d’ouvrages publics, à l’image du chantier du Grand Paris Express démarré en 2016.
Évolutions réglementaires majeures de la nomenclature ICPE #
Depuis la refonte réglementaire de mars 2012 validée par le Conseil Supérieur de la Prévention des Risques Technologiques (CSPRT), la rubrique 2515 bénéficie d’ajustements visant à supprimer les distinctions fixes/mobiles au profit de la notion de durée d’exploitation, mettant fin à une inégalité de traitement remarquée sur le terrain.
L’adoption d’un seuil de 200 kW introduit une graduation innovante pour les exploitants ; un découpage entre installations soumises à déclaration, enregistrement ou autorisation selon la puissance cumulée du parc matériel. Les mises à jour ultérieures, notamment celles prescrites par l’arrêté du 22 octobre 2018, renforcent l’application des mesures sur toute la chaîne, impliquant désormais aussi les sites relevant des rubriques 2516 et 2517 (transit de produits minéraux pulvérulents non ensachés, tri de déchets inertes) afin d’éviter toute procédure administrative redondante.
- La suppression du critère « mobile » en 2012 harmonise la régulation pour tous types de matériel.
- Un seuil intermédiaire à 200 kW ouvre la voie à de nouvelles modalités de contrôle et de simplification, pensées pour les entreprises de taille intermédiaire, comme Société des Granulats Vicat (secteur matériaux de construction) installée à Lyon.
- Le régime de l’enregistrement s’étend désormais à la majorité des exploitations dépassant ce seuil, sauf exceptions clairement relevées dans la réglementation.
L’enregistrement dématérialisé sur le portail de l’INERIS et l’adaptation continue des textes facilitent la tâche administrative, tout en maintenant une exigence constante de maîtrise environnementale, résultant d’audits réalisés depuis 2020 dans des sites comme Granulats Sud Ouest ou Eiffage Route en Auvergne-Rhône-Alpes.
Seuils de puissance et conséquences pratiques sur l’exploitation #
La puissance totale installée, exprimée en kilowatts cumulés, détermine directement le régime de classement ICPE sous la rubrique 2515. Les modalités d’exploitation évoluent selon trois seuils principaux :
Puissance installée (kW) | Régime ICPE applicable | Obligations principales |
---|---|---|
Moins de 40 kW | Aucune procédure ICPE | Respect des normes générales et du code du travail |
De 40 kW à 200 kW | Déclaration | Dossier de déclaration ICPE, respect automatique des prescriptions applicables, contrôle périodique |
De 200 kW à 550 kW | Enregistrement | Dossier d’enregistrement, étude d’impact environnemental systématique, contrôles inopinés par la DREAL |
Plus de 550 kW | Autorisation | Enquête publique, étude de dangers, arrêtés préfectoraux spécifiques, mesures renforcées |
L’impact sur l’organisation opérationnelle est immédiat dans chaque cas : la gestion du parc documentaire doit être irréprochable, les protocole d’autosurveillance mis en place et la traçabilité de chaque action prouvée lors des inspections annuelles menées par la DREAL. Des sociétés telles que Eurovia (VINCI) à Paris ou Granulats du Littoral au Havre signalent une hausse de 18% du coût de conformité lors du passage du régime de déclaration à celui d’enregistrement en 2021.
- Documents d’exploitation et plans d’ensemble mis à jour pour chaque modification de puissance.
- Obligation de notification des changements à la préfecture dans un délai de 30 jours, sous peine de mise en demeure.
- Contrôles renforcés pour les seuils supérieurs à 550 kW, avec audits environnementaux annuels systématiques.
Prescriptions environnementales spécifiques et obligations de l’exploitant #
Les prescriptions générales relevant de la rubrique 2515, codifiées principalement dans l’arrêté du 26 novembre 2012 et ses adaptations, couvrent un vaste spectre de contrôles et de protections, imposées à chaque exploitant du secteur minéral :
- Implantation : localisation à distance réglementaire des zones habitées (minimum 100 mètres pour les installations permanentes selon l’arrêté 2018), prise en compte du relief et du vent dominant.
- Conception : intégration de dispositifs anti-poussières et anti-bruit issus des dernières technologies (ex : brumisation automatisée, isolation acoustique des équipements chez Vinci Construction France depuis 2022).
- Protection contre les nuisances : seuils d’émissions atmosphériques (valeurs limites d’émissions – VLE), limitation du volume horaire de poussières, contrôle acoustique 55 dB(A) de nuit, 70 dB(A) de jour.
- Gestion des eaux et des déchets : séparation obligatoire des eaux pluviales et industrielles, traitement des résidus de lavage, évacuation via filières agréées conformément à la réglementation européenne (directive 2010/75/UE).
- Prévention des risques accidentels : présence de dispositifs coupe-courant, plan d’intervention d’urgence, formation continue du personnel (chiffre clé : plus de 7500 salariés formés aux procédures ICPE en 2023 chez Colas SA).
- Respect des plans d’ensemble et justification documentée de chaque mesure environnementale mise en œuvre– toute carence étant passible de sanctions immédiates lors des inspections de la DREAL.
Cette rigueur généralisée bénéficie d’un appui méthodologique, tels que les guides techniques édités par l’INERIS et le BRGM, portés à la connaissance de tous les exploitants via l’Union Nationale des Producteurs de Granulats.
Défis actuels et axes d’amélioration pour les sites classés #
Le pilotage quotidien d’un site classé sous la rubrique 2515 présente une série de défis, accentués ces dernières années par l’augmentation des contrôles et la sophistication des exigences locales. Les principales problématiques rencontrées par les exploitants comme Granulats Vicat en Isère ou Carrières de la Vallée de l’Oise incluent :
- Maîtrise des émissions atmosphériques : nouvelles VLE effectives depuis avril 2019, nécessitant l’adoption de solutions novatrices comme les filtres à manches chez Eqiom Granulats.
- Gestion de la mobilité des installations : pour les chantiers temporaires, besoins accrus en déclaration, suivi GPS en temps réel et gestion centralisée des autorisations sur plusieurs sites dans la même région.
- Adaptation au zonage local et au voisinage : pressions croissantes sur les distances d’implantation des équipements vis-à-vis des habitations ou établissements sensibles (écoles, hôpitaux).
- Anticipation des évolutions réglementaires : le passage fréquent des seuils de puissance contraint les exploitants à investir dans des outils de simulation et de veille active sur les projets de loi à venir.
- Préparation des visites d’inspection : audits inopinés menés par les inspecteurs DREAL, contrôle du respect de plus de 80 points précis (du bruit à la gestion des déchets dangereux).
Pour limiter la survenance de contentieux environnementaux, nous recommandons une approche proactive :
- Mise en place d’un système de management environnemental (type ISO 14001) assurant la traçabilité des actions correctives et la formation continue des opérateurs.
- Dialogue continu avec les parties prenantes locales et anticipation des modifications de plan d’urbanisme susceptibles d’impacter les installations en activité.
- Engagement dans la digitalisation des procédures, permettant des audits internes plus efficaces et une gestion documentaire automatisée, à l’image de la plateforme mise en œuvre par NGE Matériaux depuis 2023.
Ressources et outils pour anticiper et piloter la conformité #
Pour répondre sereinement aux exigences de la rubrique 2515, chaque gestionnaire de site doit s’outiller avec un panel structuré d’appuis réglementaires, opérationnels et techniques. Les textes légaux essentiels incluent :
- Arrêté du 26 novembre 2012 modifié par l’arrêté du 22 octobre 2018 : prescriptions techniques applicables à toutes les installations de broyage-concassage soumises à enregistrement ou autorisation.
- Nomenclature ICPE mise à jour sur le site du Ministère de la Transition écologique, offrant des formulaires interactifs et guides spécifiques par typologie d’activité.
- Plateformes institutionnelles (ex : AIDA-INERIS pour le suivi des textes en vigueur, accès aux notes techniques de la DREAL Auvergne-Rhône-Alpes et DRIEE Île-de-France).
- Outils numériques d’audit interne, intégrant des check-lists actualisées d’après les dernières évolutions réglementaires (utilisés par Lafarge Granulats pour harmoniser la conformité sur plus de 27 sites en France en 2024).
- Guides techniques fournis par le BRGM et l’INERIS, modules de formation pratiques pour la préparation des dossiers ICPE.
Dès la phase de projet, l’accompagnement par des bureaux d’études spécialisés (Arcadis, Egis Conseil), conjugué à une implication régulière des équipes locales, permet non seulement l’optimisation du montage administratif mais aussi le pilotage rapproché des indicateurs lors de l’exploitation courante.
Pour garantir une conformité durable, il est capital de :
- Centraliser la documentation (plans, rapports de mesure, courriers d’échange avec l’administration) sur des plateformes sécurisées.
- Former régulièrement les agents de terrain avec des modules adaptés aux évolutions réglementaires constatées (mise à jour annuelle obligatoire depuis janvier 2022).
- Établir des audits croisés entre sites du groupe pour homogénéiser les bonnes pratiques et anticiper toute dérive.
La réussite d’une exploitation responsable selon la rubrique 2515 repose sur la capacité à conjuguer réactivité, anticipation réglementaire et culture de la performance environnementale, qualités que nous jugeons essentielles pour survivre et prospérer dans un univers industriel en complète mutation.
Plan de l'article
- Rubrique 2515 : Maîtriser la réglementation du broyage et concassage pour une exploitation responsable
- Périmètre de la rubrique 2515 et activités concernées
- Évolutions réglementaires majeures de la nomenclature ICPE
- Seuils de puissance et conséquences pratiques sur l’exploitation
- Prescriptions environnementales spécifiques et obligations de l’exploitant
- Défis actuels et axes d’amélioration pour les sites classés
- Ressources et outils pour anticiper et piloter la conformité